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Rock en Seine, Paris, le 28 août 2010

 

Au moment d'écrire une note sur cette journée de Rock en Seine, il y a comme un doute qui s'insinue en votre doux serviteur. Ai-je vraiment envie de parler du festival lui-même, qui m'a semblé encore plus mou et consensuel que je le croyais (pour vous dire, je n'ai même pas croisé un seul mec bourré), de sa programmation très très discutable (des gens comme Plan B et Two Door Cinema Club devraient être interdits de séjour sur notre territoire - mais que fait Brice Hortefeux ?) et de sa seule et unique idée géniale (mettre des poubelles dans le Parc de Saint-Cloud, où incroyable mais vrai il n'y en a pas le reste de l'année) ? Notez que la journée de la veille ayant été semble-t-il illuminée par les prestations de Blink 182 et de Skunk Anansie (non, nous ne parlons pas de l'édition 1997 du Rock dans tous ses états), le pire était derrière nous.

 

Et c'est vrai que les Stereophonics ne constituent pas le pire du rock contemporain (enfin, de 1997, entendons-nous bien). Ils en sont en quelque sorte le baromètre discret, groupe en tout point moyen permettant aux autres de se situer. On imagine les discussions backstage après les concerts : "Alors ? C'était bien ?" "Ecoute, je te mets +3 sur l'échelle des Stereophonics". Show moyen, donc (quelle surprise), principalement composé de mid-tempo (oui car même leurs rythmes sont moyens). En fait chez ce groupe, le seul truc qui est bien c'est la voix du chanteur, qu'il n'utilise malheureusement que pour brailler des niaiseries (car l'intelligence des Stereophonics est - je vous le donne en mille - moyenne). Bref. Pas désagréable, mais pas spécialement bien. Si on osait, on dirait que c'était le typique concert de festival à 17 heures.

 

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On sera évidemment nettement plus emballé par le set de Martina Topley Bird, et l'on ne remerciera jamais assez Où est le Swimming Pool d'avoir fait place nette pour lui laisser un petit créneau. Oui, j'ose. Pour vous dire, quand Martina a dit qu'on pensait très fort à lui, tout le monde a applaudi et je ne suis pas sûr du tout qu'il n'y avait pas une petite part d'ironie de la part du public. En tout cas chez moi, oui. Mais comment penser autrement ? Voix enchanteresse, percussions, mélodies cristallines... on aura même droit à une superbe version d''Overcome' (il fallait bien ça pour compenser la bouillie délivrée par Tricky lors de son dernier passage parisien). A la limite, ce qui est presque choquant, c'est qu'une artiste d'aussi grande classe n'ait pas été dès le départ prévue à l'affiche. Mais bon : comme tout le monde, j'ai depuis longtemps renoncé à essayer de pénétrer la logique des progs de festivals.

 

Pause dîner et premier gros morceaux de la soirée avec les Queens Of The Stone Age, qui se paient même le luxe de démarrer légèrement en avance. Comment dire ? Ces gens sont tout de même d'une classe extraordinaire. Même dans un concert de festival à la set-list best of, même en enquillant les banalités entre les morceaux, même dans un show ultra-carré... il se dégage de Josh Homme une coolitude, une décontraction rarissimes. Le mec joue devant des milliers de personnes comme il jouerait dans un petit club poisseux, même énergie, même générosité et mêmes poses (il faut voir comment il foudroie du regard le public qui se met à applaudir après le premier break de 'Song for the Dead'). Allez, un petit reproche toutefois : la prédominance des titres de Rated "R" et Songs for the Deaf n'aura probablement pas semblé très rassurante à tous ceux qui s'inquiètent de voir l'art de Josh Homme légèrement décliner depuis quelques années. Comme on l'avait déjà noté il y a quelques semaines concernant Tricky, il est toujours un peu étrange de voir un artiste se reposer sur des morceaux vieux de plus de dix ans pour enthousiasmer la foule. Certains diraient que c'est le début de la fin, en général. Mais l'honnêteté oblige à reconnaître que du strict point de vue musical, ça ne s'entendait pas vraiment hier soir.

 

Nouvelle pause à présent, histoire de commettre le péché ultime (sauf sur DLMDS) : monter un commando de vrais de vrais, de purs et durs, susceptibles de laisser femmes et enfants s'écrabouiller devant les de plus en plus bobos Massive Attack, tandis que sur la petite scène, s'ébroue sa Majesté Jello Biafra en personne. Nous vivons quand même dans un drôle de monde : Biafra est une des dernières légendes vivantes du rock, a inventé un genre musical qui a influencé trois générations et une manière de chanter qui a profondément marqué les plus grands. A Massive on doit le trip-hop, vague mode disparue depuis plus d'une décennie, ainsi que quelques albums à succès, dont beaucoup de branlette depuis le (ou à partir du) surestimé Mezzanine. On ne demanderait pas quand même que Jello soit tête d'affiche... mais pousser le vice jusqu'à le faire jouer EN MÊME TEMPS que Massive, soit donc devant quasiment personne hormis trois centaines de vrais rockers, c'est assez sévère. Nul doute qu'il aurait brasser beaucoup plus de monde s'il avait eu droit à son set perso - précisons que ces deux concerts étaient les seuls à se chevaucher de toute la journée. La remarque méritait d'être faite, car dans l'absolu voir Massive ne m'aurait personnellement pas dérangé. Comment peut-on être stupide au point de faire jouer des artistes aussi importants simultanément ? Pourquoi pas mettre les Stereophonics là, plutôt ? C'est vrai : les Stereophonics ont vendu des disques aux auditeurs de RTL2, fut un temps. Que peut bien représenter Jello Biafra à côté de ça ?

 

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Peu importe. Finalement, on ne regrettera pas une seule seconde d'être allé applaudir le trublion pamphlétaire, égal à lui-même, c'est-à-dire gesticulant, harraguant la (petite) foule, grimaçant, dansant, braillant à s'en décrocher la machoire. A cinquante-deux ans, Jello est toujours dans une forme olympique, invite poliment à [biiiiiiiip] Nicolas Sarkozy ("qui s'invente de faux ennemis pour sauver son cul" ; bah alors Jello, on a eu le journal, ce matin ?), d'un charisme et d'une générosité à faire passer les Queens Of The Stone Age pour de gentils amuseurs. D'ailleurs, sur le côté de la scène, Josh Homme est venu prendre sa leçon, qui s'esclaffe des pitreries du Maître comme un l'ado fana de hardcore qu'il était encore aux débuts de Kyuss.

 

Certes, le groupe actuel de Jello n'est pas les Dead Kennedys, ni même Ministry ou les Melvins (qui servirent tous deux à différentes époques de backing band au légendaire chanteur de Frisco). Mais comme sur leur (très bon) dernier album (The Audacity of Hype), ils font le taf avec énergie et altruisme, conscients de toute façon que personne n'a rien à foutre d'eux et que tous les regards sont braqués sur Jello et ses mimiques, Jello et ses discours, Jello et sa blouse de médecin couverte de faux sang, sa cagoule et sa gestuelle évocatrice. La crème du dernier album y passe (dont les monstrueux 'Panic Land' et 'Electronic Plantation'), agrémentée bien évidemment de quelques classiques des Dead Kens ('California', 'Let's Lynch the Landlords'), quoiqu'en nombre raisonnable (le syndrome Iggy Pop est encore loin). Et dire qu'à trois kilomètres de là ce sont les dieux de la musique de pub qui osent se faire appeler Massive Attack. Il y en a qui ne manquent pas d'humour.

 

Thomas

 

http://www.myspace.com/jellobiafraandthegsm

www.myspace.com/queensofthestoneage

http://www.myspace.com/martinatopleybird

http://www.myspace.com/stereophonics

 

Commentaires

Au moment d'écrire un commentaire sur cette chronique, il y a également comme un doute qui s'insinue en moi. Pourtant, ce ne sont pas les scrupules qui m'étouffent lorsque je veux -gentiment- taquiner l'un des membres de DLMDS. Mais à quoi bon titiller Thomas, auteur brillant d'article souvent remarquables, sur des points de détail en plus ? Bah, vaut mieux ça que d'apparaître faussement flagorneur : "Génial ! Super papier ; t'es le meilleur !" (je précise que quand je pense vraiment cela, je ne le dis pas... comme pour son article sur "Thérèse Raquin" dans le Glob)

Détail n°1 : l'absence de "mecs bourrés" que tu sembles regretter. Or rien de plus pénible qu'une cohorte d'épaves sur un concert... La quantité de gens éméchés et/ou défoncés n'étant jamais en plus le gage de la réussite d'un festival !

Détail n°2 : la pique trop sévère à l'encontre de TDCC. Je ne suis certes pas un fan absolu de leur pop (trop joyeuse et dansante pour moi), mais en live ça passe bien. Quand je vois certains blogueurs dénigrer le groupe et leur préférer par ex. "l'escroquerie" (pour reprendre ton terme) Clara Clara, j'en perds mon latin !

Détail n°3 : pour voir Martina programmée, dès le départ à l'affiche d'un festival, il fallait venir à la RDR cette année ! "L'audace", s'il on peut dire, à propos de Où est le Swimming Pool, perso je trouve ça limite, mais bon...

Bon, sinon d'accord sur tout le reste (notamment le côté bobo de MA) Une petite pensée pour ceux qui joueront ce soir en même temps qu'Arcade Fire, donc devant une poignée de spectateurs... Et toi, Thomas où seras-tu ?! @ +

Écrit par : J-P. | 29/08/2010

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Salut J-P !

Prologue : tu as bien raison, rien ne me gave plus que les "oh ! très bon article, je suis tout à fait d'accord". Mieux vaut se taire, dans ces cas-là :-)

1°) je ne suis pas non plus fana des mecs bourrés... c'était plutôt une manière de dire à quel point j'ai trouvé l'ambiance de ce festival lisse, et pas forcément très personnelle. Mais quand on recrute principalement des grosses stars indés à la limite du mainstream et qu'on pratique des tarifs prohibitifs, supérieurs à toutes les autres manifestations, c'est sans doute inévitable...

2°) oui, je suis d'autant plus cruel que je n'en ai entendu que quelques morceaux... mais ce que j'ai entendu était plus que joyeux, limite dansant, le genre de truc qui a tendance à me filer des frissons de terreur. Donc "interdits de séjour" est peut-être un peu fort. Une reconduite à la frontière suffira ^^

(cela dit je te rejoins à 100 % sur l'escroquerie Clara Clara, archétype du groupe de seconde zone qu'on encense presque uniquement parce qu'il en est un, de groupe de seconde zone)

3°) écoute je ne sais pas, je n'ai toujours pas entendu une note de ce truc. Faudrait vraiment me fouetter pour que j'écoute un truc avec un nom pareil (chaque détail compte, comme dirait Civil Titi)

Question subsidiaire : je serai tranquillement chez moi en train de manger un couscous... le prix à la journée était un peu élevé pour voir Arcade Fire, eels égrenant les titres de son innommable dernier album, ou Bryan Ferry danser au milieu des momies. Je préfère de loin me payer un bon repas.

A+

Écrit par : Thomas | 29/08/2010

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pas tout à fait d'accord sur QOTSA.
J'ai trouvé Josh Homme fatigué, pas en forme. Il a fait le job, le minimum pour assurer un concert correct (grandement desservit pour un son tout pourri d('où tout de même ressortait son chant), mais bien loin de l'énergie et de l'enthousiasme que je l'ai vu dépenser en d'autres occasions. Pas vraiment le début de la fin je pense mais le signe qu'il est temps qu'il fasse un bon break.

Par contre après avoir laissé Massive Attack quasiment dès les premières notes je m'étais arrêtée pour écouter un peu Jello Biafra, et c'était bien là qu'il fallait être. j'ai cédé à la fatigue et suis partie, j'aurais pas du à te lire, dommage.

Écrit par : rififi | 30/08/2010

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Comme Rock en Seine m'a manqué cette année... (une première) :-)

Écrit par : Ska | 30/08/2010

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Rififi >>> concernant les QOTSA, c'était la première fois que je les voyais donc d'une certaine manière je ne pouvais pas non plus être objectif. Dans ces cas-là, le plaisir de voir un groupe longtemps attendu fait la moitié du boulot (quoique ça ne marche pas avec tout le monde, certes...)

Ska >>> oui mais bon, tu avais un mot d'excuse de la pédiatre ;-)

Écrit par : Thomas | 30/08/2010

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