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Gil Scott-Heron, le New Morning, le 10 mai 2010

 

Curieux comme ce revenant, déglingué alternativement par la drogue et la prison, et plus très jeune en tout cas, semble en forme. Hormis au Lido et à la Comédie française, il est devenu rare qu'on fasse deux concerts d'affilée comme ce soir au New morning. On a délaissé celui de 19h30 pour le second annoncé à 21h30. Avec 1h de retard on franchit les portes, ce qui est très bon ou très mauvais signe. Peut-être a-t-il tout simplement fait un set plus long que prévu?

 

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Le public varié vient admirer pour certains leur découverte récente, revoir un vieil ami pour d'autres, ou encore se délecter d'un héros historique de la soul music engagée. On ne fera pas partie des esprits chagrins qui lâchent en sortie, la lippe boudeuse, qu'il ne chante plus très bien ou qu'ils se sont ennuyés. A ceux-là, on recommande de ne pas aller voir un artiste juste parce que tout le monde en parle, et de rester dans les quartiers snobs auxquels ils sont, grand bien leur fasse, plus habitués que nous!

 

Un grand échalas débarque, longue carcasse en t-shirt rouge. "Hé, mais il nous fait du stand up là!" Bingo, vous avez devant vous l'un des plus grands noms du spoken word, il a gardé le goût de la diatribe politique qui nourrit tant de ses chansons. Là, il plaisante sur le volcan qui lui a fait annuler plusieurs dates, et rappelle avec un grand sourire combien il aime se produire dans cette salle. Qui lui rend toute la chaleur possible.

Après quelques minutes de mise en bouche, il s'installe seul au piano pour deux titres. La voix est plus grave et éraillée que dans le passé. Mais elle reste juste, suave à sa manière, on frissonne et on se laisse prendre. La setlist ressemblera beaucoup à celle de son live Tour de force, dans des versions plus sobres et souvent plus réussies. D'ailleurs hormis quelques malchanceux, personne ne songe à regretter que son nouvel album, le fabuleux I'm new here, ne soit représenté que par un titre ('I'll take care of you').

Une setlist ultra politisée, alliant morceaux moins célèbres ('blue collar', 'the other side'), titres politico-écologistes ('We almost lost Detroit', 'Three miles down', avec le public sollicité pour les choeurs, plus punchy que l'original), et deux de ses plus beaux classiques ('the bottle', 'home is where the hatred is', 'winter in America').

 

Le Midnight band n'est plus très jeune, mais entre congas, flute, saxophone, orgue, et la voix du maître, l'alchimie est intacte. "GSH" n'est pas venu faire "son" show, mais un concert qu'il partage pleinement avec ses musiciens, comme dans cette version de 'The bottle' de près de 20mn chrono, dont la moitié remplie par un solo de congas! Scott-Heron est aux anges, il profite, il se sent bien, et l'énergie qui circule dans la salle est pleine d'affection, de bien-être. D'un peu de reconnaissance aussi, sans doute. Certains dansent, le public encourage et réagit comme dans un club de jazz, et on emmagasine les souvenirs d'un moment hors du commun.

 

Il s'est passé quelque chose ce soir au New Morning. Les morceaux s'enchaînent, tellement réarrangés qu'on ne les reconnaît pas tout de suite, en faisant la part belle à des variations de 'Winter in America'. Un concert aussi thématique musicalement que politiquement, donc. Un concert où les accords de piano et le midtempo ont évidemment la part belle. Occasion de rappeler à ceux auraient oublié, à quel point ce diseur et harangueur est un compositeur classieux. D'autant qu'ici le bon goût est roi, loin des productions laides du milieu de sa carrière. On savoure chaque instant, chaque solo. Cette grande tige qui nous toise toutes dents dehors, c'est lui, l'épave magnifique, notre adoré drogué, celui qui a si souvent raison et qui s'est tellement fourvoyé, nouvel avatar du clochard céleste, un grand en tout cas, Gil, un très grand.

 

Arbobo

 

http://www.myspace.com/revolutionwillnotbetelevised

Commentaires

Hé bin, je vous envie les mecs. Je vais tenter une session de rattrapage à la rentrée. Des vieilles gloires comme ça, qui continuent leurs trucs en toute intégrité artistique, moyennant tout le respect que je porte à l'œuvre ancienne comme récente, ça en impose et c'est pas si courant, malheureusement.

Écrit par : Roger Guy | 17/06/2010

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