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The Tallest Man On Earth, le Scopitone, le 10 mars 2010

 

Deux ans que l’on attendait impatiemment le passage du Suédois sur le sol français ; première fois il y a quelques semaines à la Route du Rock, puis une inédite date parisienne au Scopitone. Enfin. On l’avait découvert au printemps 2008, avec un Shallow Grave lumineux, et depuis, on ne rêvait que de voir le phénomène mystérieux, voir cette magie minimaliste se produire sur scène. Au départ, le souhait ressemblait plus à un songe, tant la confidentialité qui entourait Kristian Matsson était entier. Puis, les spots commencèrent enfin à se poser sur The Tallest Man On Earth, sorte de secret bien gardé par ceux considérant désormais comme trop commun les succès de Bon Iver ou Fleet Foxes. Shallow Grave est alors devenu une sorte de relique moderne, à contre-courant des influences de l’époque, sortant d’un peu nulle part, du fin fond de la province suédoise, faisant de Matsson une icône underground et confidentielle d’un idéal indie.

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C’est dans ce contexte que débarque au printemps 2010 The Tallest Man On Earth dans la pire salle de concert de Paris, qui sera pourtant presque une scène idéale à l’interprétation de ce que représente aujourd’hui Kristian Matsson. Armé de sa seule guitare, et de sa voix qui le caractérise, il sera au centre d’un cirque qu’il ne maîtrisera jamais vraiment, mais dont il ne se doutait probablement pas. D’un côté, des habitués ou invités du Scopitone, venus s’abreuver et s’accouder au bar, n’ayant jamais entendu parler du folkeux suédois ; de l’autre, une poignée de fans acquis à sa cause et idolâtrant Matsson, pour l’artiste, mais surtout pour ce qu’il représente. Pris entre deux feux, Matsson n’aura le choix que d’affronter l’ignorance et l’irrespect des premiers, tout en satisfaisant les seconds dans un exercice, que l’on sent pour lui contre-nature mais qu’il maîtrise parfaitement.

 

Bien que seul face à cette salle comble et disparate, Matsson sait capter l’attention. Car en addition de ses compositions talentueuses, le Suédois s’avère disposer d’un talent scénique incomparable. Vivant et personnifié, le set de The Tallest Man On Earth sera une suite d’histoires finement racontés, joués et savamment mis en scène. Si Matsson interprète aussi bien le séducteur que l’homme blessé, c’est qu’il ne le joue pas ; au-delà de ce qu’il dégage, ce qu’il est, c’est ce qu’il donne. Ainsi lorsqu’il interprète le rêveur 'Where Do My Bluebird Fly', le battant 'The Gardener' ou le résigné 'I Won’t Be Found', celles-ci ne feront que confirmer cette intégrité d’un compositeur qui nous capte tant. Cette voix éraillée, cette puissance puisée au plus profond d’un soi exhibé au regard de tous, deviennent ainsi réalité tandis que Matsson se joue habilement d’un rôle d’entre-deux (plaire au public qui l’ignore, descendre du piédestal que ses fans ont établi pour lui), tout en restant fier, fragile et glorieux.

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C’est l’occasion par ailleurs de découvrir quelques titres du nouvel album, dont on retiendra 'King Of Spain' et 'The Wild Hunt', qui ne feront que confirmer la forte influence du folk américain sur Matsson, qu’il assume désormais complètement. On ne manquera également pas de remarquer que malgré tout, les accords, les rythmiques se ressemblent parfois, comme un gimmick, un motif réutilisé. Néanmoins, chaque chanson semble être une nouvelle histoire fabuleuse, un nouveau voyage, mais toujours en solitaire. Les cordes et accords résonnent fort au sein d’un Scopitone miteux. The Tallest Man On Earth se mue tour à tour en fin conteur, en amant vindicatif, en reclus fataliste. Mais Matsson ne nous aura pas trompé ; malgré les rapprochements d’avec son public, les sourires et l’entrain, The Tallest Man On Earth est le fruit d’une solitude sublimée, d’un confinement transcendant.

 

Cet appel de l’intime, cette promiscuité sous-jacente, est exactement la raison pour laquelle certains l’honniront autant que d’autres l’aduleront. Sur disque ou sur scène, les choses varient finalement peu, car dès le départ Matsson nous aura tout livré, sans fard, sans honte. Cependant, si Shallow Grave conservait cette distanciation intrinsèque, voir Kristian Matsson rend concret cette sensation douce-amère d’une réalité ineffable. Au travers de ces chansons d’une sincérité bouleversante et d’une beauté infinie diluée au sein d’une époque indéfinie, The Tallest Man On Earth, mise à nu dépouillée de Kristian Matsson, est ainsi devenu un concept humaniste et intimiste, figure à la fois idéale et torturée, assumant seul et avec courage, existence et regrets.

 

Kris

 

http://www.myspace.com/thetallestmanonearth

Commentaires

ahlala, quand tu écris comme ça, tu pourrais me faire acheter l'annuaire de Tirana 1976 (et même les pages jaunes)
:-)

Écrit par : arbobo | 16/03/2010

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Tiens j'avais manqué ce commentaire...

Et encore, je me suis retenu de parler de sa reprise de These Days de Nico, sinon j'en aurais encore tartiné des tonnes :)

Écrit par : Kris | 22/03/2010

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J'ai apprécié la lecture de votre article.

Il est si coloré et il capte le thème principal de ce que l'article est tout au sujet. Il est tout simplement incroyable.

Écrit par : resume | 22/04/2010

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Merci beaucoup pour ce merveilleux article

Écrit par : car games | 09/03/2011

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Les commentaires sont fermés.